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[Laurent Lamy]

Interview Anga pour Batteur Magazine
Par Laurent Lamy


C'est à l'occasion de la présence d'Anga au salon "Musicmania" que nous avons pu nous entretenir avec ce musicien unique à propos de la récente parution de sa vidéo "Angamania" et de sa collaboration au dernier disque de Steve Coleman.

Miguel "Anga" Diaz est né le 15 juin 1961, dans la province de Pinar del Rio à Cuba. Il commence à étudier la percussion dés l'age de dix ans et en quelques décennies, il devient l'un des percussionnistes les plus prestigieux de la planète. Sa réputation démarre avec sa participation au groupe "Irakere" mais ce maître percussionniste est beaucoup plus que cela! Il a enregistré et tourné avec Steve Coleman avec lequel il vient de terminer un récent album. On se souvient aussi de sa prestation avec Roy Hargrove au sein d'une rythmique de rêve composée de changuito et de Julio Baretto. Son parcours original atteste de son ouverture d'esprit et de sa virtuosité qui l'ont amené à jouer toute sorte de musiques avec, peut-être une prédilection pour le jazz. Ce qui n'est pas surprenant quand on sait quel extraordinaire improvisateur il est! Ce qui fait la force des musiciens cubains, c'est qu'ils ne se coupent jamais de leurs racines et Anga ne fait pas exception à la règle. C' est ainsi que nous aurons le plaisir d'apprécier une nouvelle fois son talent cet été à l'occasion d'une tournée planétaire avec les "Afro-cuban all Stars" avec lesquels il a enregistré le magnifique album "A Toda Cuba le Gusta" en 1997.



Quelle est ta formation musicale ?

Miguel "Anga" Diaz : J'ai commencé à l'âge de dix dans les écoles provinciales cubaines puis j'ai fais mes études supérieures à la Havane. J'ai étudié toute la percussion classique.

La percussion classique t'influence-t-elle toujours aujourd'hui ?

Miguel "Anga" Diaz :Oui, bien sur ! Principalement le vibraphone et le xylophone.

Tout le monde te connaît pour ta participation à Irakere mais quels sont les autres groupes dans lesquels tu as joué ?

Avant Irakere, j'ai joué pendant dix ans dans un groupe qui s'appelait "Opus 13", ce qui a été ma première expérience professionnelle. Nous jouions une musique très proche de celle d'Irakere, c'est à dire une fusion de latin-jazz et de musique classique... C'était l'un des groupes les plus importants et les plus novateurs de l'époque avec lequel j'ai beaucoup tourné dans le monde entier. A ce moment là, je faisais aussi beaucoup de séances pour des musiques de films.

Tu joues dans le dernier album de Steve Coleman, tu as participé aux projets de Roy Hargrove, de Danilo Pérez, David Sanchez... J'ai l'impression que tu te diriges beaucoup vers le jazz. Est-ce un choix délibéré de ta part ?

Miguel "Anga" Diaz :Je suis musicien avant tout. J'aime toutes les musiques mais ce que j'ai le plus joué, c'est le jazz. Tu sais, dans les écoles à Cuba, le jazz est la culture musicale la plus prestigieuse de notre apprentissage. Petits, nous avons tous écouté du jazz, les big-bands, Chick Corea... C'est ce qui explique l'apparition des groupes comme "Opus 13" et "Irakere".

Tu es un percussionniste qui a une grosse réputation de soliste, n'est-ce pas non plus pour cela que tu es attiré par le jazz ?

Miguel "Anga" Diaz :Exactement ! Ce que j'aime dans le jazz, c'est la liberté, les harmonies et la possibilité d'improviser. Lorsque je jouais avec "Irakere", nous avions un morceau durant lequel tous les autres musiciens sortaient de scène tous les soirs et me laissaient improviser seul pendant vingt minutes sur scène. C'est comme cela que j'ai commencé à beaucoup développer les solos. Je n'écoute pratiquement pas de percussionniste mais beaucoup de pianistes, des trompettistes, des saxophonistes... Le jazz a toujours influencé la musique cubaine.

Un jour, lors d'une de tes démonstrations, tu nous as dit "l'instrument mère, c'est la batterie". Lorsqu'on t'écoute, on entend un jeu très proche de celui d'un batteur ! Peux-tu-nous en parler ?

Miguel "Anga" Diaz : Tu sais, à l'époque où j'étudiais à la Havane, on ne donnait pas de cours de conga. Il fallait l'appendre tout seul, dans la rue. Mon premier instrument a donc été la batterie. J'ai transposé le concept de la batterie en retravaillant exactement les mêmes exercices de "stick control" de la caisse claire en ayant la même souplesse de poignets qu'un batteur sur les congas. A Cuba, tous les batteurs connaissent la conga et les batas et en incorporent des éléments sur la batterie. Pour moi, l'instrument "mère" c'est la batterie au niveau de la technique et "le père" c'est le piano car je joue les congas en écoutant la mélodie du piano et un peu de la basse aussi. Lorsqu'il n'y en a pas, je prends sa place en faisant des "clins d'œil" empruntés au piano.

Comment s'est déroulé le travail dans le disque de Steve Coleman ?

Miguel "Anga" Diaz : Steve travaille toujours à partir de patrons rythmiques qu'il invente ou qu'il prend d'un rythme africain, indien ou afro-cubain... Je dois incorporer la percussion cubaine dans ces patrons qu'il nous donne au début des concerts. Ce sont des guides d'improvisations à partir desquels chaque musicien part librement mais toujours en respectant le rythme de départ qui peut changer en cours de route. Tous les musiciens connaissent le jeu des autres, ce qui permet de développer un concept totalement expérimental. Dans le disque, nous avons procédé comme sur scène.

Ton actualité, c'est aussi ta vidéo "Angamania" ! J'ai été assez surpris par l'originalité du contenu car tu montres ton travail avec un D.J. Pourquoi avoir choisi une telle démarche ?

Miguel "Anga" Diaz : Premièrement, je n'ai pas choisi n'importe quel D.J ! Je l'ai choisi parce qu'il est d'abord musicien. Il connaît les rythmes afro-cubains et possède une très bonne oreille. Les rythmes traditionnels ont été montrés dans de nombreuses vidéos. Ce que je voulais faire, c'est démontrer qu'avec la percussion cubaine, on peut tout jouer. Un percussionniste est d'abord un musicien qui doit savoir tout jouer et pas seulement la salsa. La percussion ne se réduit pas seulement à des rythmes, c'est de la musique !

Tu parles de l'influence de Jorge Alfonso et de Tata Güines sur ton jeu, peux-tu-nous en dire un peu plus ?

Miguel "Anga" Diaz : Jorge Alfonso était le percussionniste d'"Irakere". C'est lui le premier qui a joué sur cinq congas à Cuba. Lorsqu'il est mort, c'est moi qui l'ai remplacé.
Lorsque je suis arrivé, il a fallu que je joue sur cinq congas aussi et que je respecte le style du groupe. C'était un héritage très fort que j'ai du digérer pour ensuite développer mon propre style à partir de ce qui était déjà là. Tata a toujours été mon maître même si je n'ai jamais pris de cours avec lui. Pour moi, sa musicalité vient du fait qu'il est aussi bassiste tout en étant autodidacte au départ. Il est une référence car il a été le premier à s'ouvrir à autre chose que la percussion.

Dans ta vidéo, tu consacres une large part à l'improvisation. Tu décris d'ailleurs trois différentes parties dans tes solos.

Miguel "Anga" Diaz : Quand tu fais un solo, tu exprimes tout ce que tu as emmagasiné lors de tes voyages ou les disques que tu as écouté, tout ce que tu as appris... Lorsque j'ai enregistré la vidéo, je revenais tout juste d'une tournée de trois semaines en Indes avec Steve Coleman. J'ai échangé avec beaucoup de gens là-bas et j'ai rencontré un grand maître de tablas sur place. Ce sont les émotions que j'ai ressenti lors de ces rencontres qui m'ont donné l'idée d'incorporer une phrase de tablas dans le solo de la vidéo. Ce qui fait le solo, c'est ce que tu as en toi à ce moment là. Si tu écoutes Giovanni (Hidalgo) jouer, tu vas entendre des rythmes haïtiens, africains ou d'autres qu'il a inventé ou cherché et tout ça forme un tout qui ressort lorsqu'il joue. Dans la vidéo, j'ai différencié trois parties pour ceux qui ne savent pas encore faire de solo, pour les aider à construire leur travail à partir d'un fil conducteur. On peut commencer à travailler de cette manière puis avec le temps on devient plus spontané. Aujourd'hui, j'arrive sur scène et je fais mon solo sans rien préparer. Je pars sur une idée et je vois où elle m'emmène !

Quelle est ta conception de l'accompagnement ?

Miguel "Anga" Diaz : Ce qu'il faut savoir faire, c'est la marcha. La conga a toujours été un instrument d'accompagnement. Après, lorsque tu sais assurer la base, tu dois non seulement accompagner mais aussi appuyer ce qui se passe autour de toi en dialoguant avec les autres.

Est-ce valable pour la salsa ?

Miguel "Anga" Diaz : Oui ! Tu vois, je crois que Giovanni et moi, nous ne sommes plus des congueros de salsa. Quand tu joues de la salsa, tu dois être solide et toujours rester dans la base pour ne pas en bouger. Nous, nous avons beaucoup d'imagination. Notre jeu est trop riche ! Nous savons le faire mais on ne le ferais pas toute l'année.

Et la musique traditionnelle ?

Miguel "Anga" Diaz : J'adore ça ! Je pars en tournée tout l'été avec Afro-cuban all stars en Asie, les U.S.A et toute l'Europe. Je vais jouer du Son. Pour pouvoir jouer du jazz et innover, il faut jouer le Son et la musique traditionnelle. Quand tu écoutes les[/i]"vieux[/i]", tu te rends compte qu'ils ont tout inventé. Nous qui arrivons après, nous apportons juste un peu plus de technique et nous ouvrons la culture sur d'autres musiques comme le jazz.

Vas-tu faire un disque sous ton nom avec tes conceptions musicales ?

Miguel "Anga" Diaz : En 1995, nous avons fait un disque avec Tata Güines qui s'appelle "Pasaporte". Je prépare un album peu à peu en mettant des idées de côté. Il s'agira d'un mélange avec des machines mais pour le moment, aucune date de sortie n'est prévue.


© Laurent Lamy - 2002

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- Echu Mingua (CD Audio 2005) | Miguel Anga Diaz
- Fiche Ariste :Miguel Anga Diaz

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Communiqué officiel du label World Circuit
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Le 10 août 2006

World Circuit are shocked and saddened to announce the death of the great Cuban conga player Miguel ‘Angá’ Díaz who died unexpectedly at his home in Barcelona on 9th August 2006, he was 45.

With his explosive soloing and inventive five conga patterns, Angá’ was widely regarded as one of the world’s great congueros. He was committed to the development of the conga drum, breaking down traditional percussion barriers to perform traditional latin rhythms, jazz, jungle and hip-hop, whilst retaining his distinctly Cuban roots.

Angá began playing prodigiously early, performing and recording professionally whilst still at college. He made his name as part of the pioneering Latin jazz group Irakere and it was with them he perfected his five drum technique. Emerging in the mid-nineties as an independent musician Angá was free to diversify and pursue a variety of different projects - from the experimental jazz of Steve Coleman and Roy Hargrove, to hip hop with Orishas, to his tours with Omar Sosa, and numerous side projects with musicians from all over the globe, Angá’s musical journey was a personal quest to explore and create new sounds and rhythmic fusions.

More than just a performer, Angá further demonstrated his commitment to the development of his instrument by teaching master classes at various schools and universities across North America and Europe. Angá produced a tuition video in 2000 which explained many of his techniques and his philosophy behind playing, it won Percussion Video of the Year from Drum Magazine. Angá would continue to teach on a regular basis and built up a network of students from his base outside of Barcelona.

Angá’s first project with World Circuit was the hugely influential Afro Cuban All Stars album recorded in 1996 which showcased the depth and vitality within Cuban music. Angá became an integral part of World Circuit’s extended Buena Vista family adding his trademark sound to albums from Rubén González, Ibrahim Ferrer, Omara Portuondo, Guajiro Mirabal, and the second Afro Cuban All Stars record. Angá’s own musical vision would emerge with the release of the album ‘Cachaíto’ an inspired union of Afro-Cuban jazz, reggae, hip hop and funk which he recorded with the Cuban bass legend Cachaíto López. Building from the foundations laid by Cachaíto’s record, and incorporating elements of his own Santeria religion, Angá would finally fulfil his dream in 2005 with the release of his critically acclaimed album ‘Echu Mingua’, an exciting fusion of styles blended together the ‘Cuban way’ and is a fitting testament to the career of one of the great musical innovators.

Angá was an irrepressible character with a larger than life personality, whose beaming grin and booming laugh were matched by a warmth and humility that touched all of those lucky enough to know him. He will be sorely missed.

[The Boss]

merci Laurent, et pour ces interviews, et pour ton inscription sur le forum

De quand date cette interview avec Miguel ?

Est ce qu'il donne toujours des cours à Paris ?

[Laurent Lamy]

Anga, c'est juillet-aout 99 et Poléo c'est avril 98.

[Link Des Bois]

Tant que l'on vous tient Mr Lamy! (quel honneur pour votre site Mr Morelle!...), j'ai personnellement une question qui me titille. Elle mérite à mon sens la réponse d'un spécialiste tel que vous meme!
Alors voila, je suis sur le point de me procurer une triplette de bougaroubous, d'une part pour etudier les rythmes tradit de Casamance, et d'autre part pour jouer les techniques et rythmes traditionnels afro-cubains, -et tout ce qui s'en suit!-.
Ma question est la suivante: y-voyez-vous une objection particuliere, c'est-a-dire, pensez-vous que cela pourrait m'handicaper(techniquement, musicalement,... ou autre), par rapport a un approfondissement sur les congas elles meme. Existe-t-il des incompatibilites, des impossibilites?
Merci d'avance pour votre reponse, et pour les articles que vous nous faites partager sur ce site!
Respectueusement, Link des Bois

[Laurent Lamy]

Pourrais tu simplifier ta question? Je ne suis pas sur d'avoir compris.

[Link Des Bois]

Tant que l'on vous tient Mr Lamy! (quel honneur pour votre site Mr Morelle!...), j'ai personnellement une question qui me titille. Elle mérite à mon sens la réponse d'un spécialiste tel que vous meme!

Alors voila, je suis sur le point de me procurer une triplette de bougaroubous, d'une part pour etudier les rythmes tradit de Casamance, et d'autre part pour jouer les techniques et rythmes traditionnels afro-cubains, -et tout ce qui s'en suit!-.

Ma question est la suivante: y-voyez-vous une objection particuliere, c'est-a-dire, pensez-vous que cela pourrait m'handicaper (techniquement, musicalement,... ou autre), par rapport à un approfondissement sur les congas elles mêmes. Existe-t-il des incompatibilites, des impossibilites?
Merci d'avance pour votre reponse, et pour les articles que vous nous
faites partager sur ce site!

Respectueusement, Link des Bois

[Link Des Bois]

Ma question est simple en fait:
Est-ce qu'utiliser des bougarabous pour jouer des choses specifiques aux congas (en theorie) pose un probleme, ou n'en voyez-vous pas particulierement?

[Laurent Lamy]

Personnellement, je ne vois pas en quoi le fait de jouer des rythmes cubains sur des bougarabous pose un problème. Chacun est libre même d'avoir mauvais goût. Essaye et dis nous si ça sonne, c'est ce qui compte.

[Link Des Bois]

C'est parti, rien ne m'arretera plus!...

[mbalax]

Descanse en paz el maestro Angá!
GRAN PERDIDA PARA LA PERCUSION DEL MUNDO!!!

http://www.lavanguardia.es/lv24h/20060810/51279277265.html

que en gloria sea!!!