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[Jimmy B]

[« De mémoires d’artistes … François Dupin ». 2004. Collection « Les mots d’une vie / Biographies » par Cécile Mathias. Association Percupassion (Lyon/FR.). Avec le soutien des Editions Musicales Alphonse Leduc. Edition à tirage limité. Prix indiqué : 15 €. ISBN 2-9522117-0-1]


« Encore merci – et toute ma reconnaissance au musicien, au virtuose, et à l’ami ! ». Olivier Messiaen, 1968.


Sincère et touchant dans le fond et la forme, le livret « De mémoires d’artistes … François Dupin », réalisé par Cécile Mathias, met l’accent sur un musicien particulièrement singulier. François Dupin (1931-1994) se fait offrir en cinquante pages, un bel hommage avec un album souvenir qui reprend agréablement sa vie et son parcours d’artiste. Fait d’illustrations et d’anecdotes sur l’élève devenu professeur - sur l’homme devenu artiste et pas n’importe quel artiste.

Tellement humble durant sa carrière, il ne fait pas partie des encensés de la musique. D’une humilité à la hauteur des grands Hommes, ceux dont l’honnêteté et le dévouement ont permis à d’autres de devenir à leurs tours des artistes, il a mené sa carrière avec ferveur. Sacrilège évident de ne parler que très peu de cet artiste disparu voilà déjà dix années, le livre de Cécile Mathias rectifie le tir et remet les choses à leur place. Ecrit en collaboration avec de nombreuses personnes proches de François Dupin, le livre a vu le jour grâce au soutien des Editions Musicales Alphonse Leduc , pour lesquelles François Dupin publie dès la fin des années cinquante. Imprimé en tirage limité, on découvre un recueil simple et ensemencé de souvenirs variés composés de photographies monochromes, de reproductions de correspondance, de textes d’hommages, et d’anecdotes sur les sentiers de ce « grand monsieur » de la percussion française. Un travail de recherche titanesque à féliciter.


A l’homme …

Né le 25 septembre 1931 dans la ville de Marcq-en-Baroeul (Nord), de laquelle il part avec sa famille à l’âge de huit ans pour Arès à cause de la guerre, François Dupin découvre les joies de la nature au bord du Bassin d’Arcachon. Il hésite même à un moment entre une carrière de musicien et de parqueur d’huîtres. D’abord sensibilisé et formé dans un cocon familial très favorable, il apprend le violon puis commence les percussions vers l’âge de douze ans. Déclaré quelques années plus tard comme étant un musicien précoce et prometteur par Roger Ducasse, le fils naturel de Gabriel Fauré, il est encouragé par ses proches à continuer dans sa voie. Son frère, Pierre, pratique aussi la musique et François entre au Conservatoire de Paris en 1947, dont la section Percussion venait de naître grâce à Félix Passerone. C’est alors qu’il devient élève d’un casting de professeurs incontournables : Félix Passerone, Jean Rivier, Olivier Messiaen, Tony Aubin et Darius Milhaud, avec lesquels il étudie jusqu’à obtenir son premier prix de percussion en juin 1949, sa première médaille de musique de chambre en juin 1950 et un prix de composition en 1960. Dans la classe de percussion de juin 1948, François travaille avec ses petits amis dont Jean Batigne, qui deviendra plus tard l’un des fondateurs clefs de l’ensemble des Percussions de Strasbourg. François Dupin devient d’ailleurs le premier timbalier de l’Orchestre Municipal de l’Opéra de Strasbourg et professeur au Conservatoire Municipal de Strasbourg de 1951 à 1955. Après quoi il enseigne la percussion, le solfège et l’histoire de la musique au Conservatoire National du Mans. Parcours dithyrambique, il entre comme premier percussionniste et second timbalier à l’Orchestre de Paris lors de sa création en 1967. Cette période de sa vie - les années soixante - sont très fructueuses et il devient un ami de ses maîtres à penser comme le montre un courrier d’Olivier Messiaen datant du 20 février 1968, dont la lettre se termine par cette phrase si évocatrice : « Encore merci – et toute ma reconnaissance au musicien, au virtuose, et à l’ami ! ».





En 1971, il édite le « Lexique de la Percussion », un lexique alphabétique qui définit l’usage des instruments à percussion, destiné aux jeunes percussionnistes, aux compositeurs ou chefs d’orchestres. L’ouvrage devient rapidement la référence en la matière en s’imposant comme le premier de la sorte (1971. Editions La revue musicale/Richard-Masse) Paris Sa pédagogie devient une vraie marque de fabrique et de 1970 à 1974 François enseigne à l’Ecole de Musique de Saint-Cloud, et de 1975 à 1976 au Conservatoire de Bobigny. Il obtient à nouveau en 1976 un diplôme récemment mit en place, le C.A (Certificat d’Aptitude) d’enseignement de la percussion. De 1977 à 1981 il enseigne au Conservatoire National de Bourg-la-Reine-Sceaux avant d’être nommé par Jack Lang comme Professeur de percussion au Conservatoire national supérieur de musique de Lyon en 1981. Il y enseigne et forme de nombreux élèves dont Philippe Mathias, le directeur de Percupassion et l’un des agitateurs de ce recueil – dont l’hommage rendu à l’occasion du Festival Percupassion #8 (en juillet 2004) démontre l’importance du professeur aux yeux de ses élèves tous convaincus de sa grandeur d’âme. Dans les années quatre-vingt, François rencontre et travaille avec des étrangers, il voyage, compose et écrit. Il débute en 1985 un travail d’écriture remarquable, en créant la suite de son livre « L’Orchestre Nu ». Il initie un ouvrage sur le modèle du « Banquet » de Platon, « Le banquet des musiciens », avec l’objectif de faire discourir les musiciens sur l’amour de leur métier. A cette occasion il élabore un sondage professionnel mais n’aura pas le temps de terminer son œuvre.

Reconnu par ses aînés, comme Robert Tourte (le fondateur de l’Ecole française de la Percussion), et unit à de nombreuses personnes du milieu musical contemporain et classique, François Dupin nous a quitté en laissant derrière lui un édifice talentueux. Multi-percussionniste, compositeur, artiste, écrivain, pédagogue, étudiant dans l’âme et bon vivant, le musicien s’est illustré comme un personnage évocateur de la Percussion en parcourant les échelons sans jamais oublier les valeurs du respect. L’amour que François Dupin porte aux percussions et à la musique en général, se révèle au travers de ses nombreuses collaborations, dont les témoignages - à fleur de peau - de ses amis attestent d’une grande sensibilité. L’art des percussions est grand et François Dupin est l’un de ses prophètes.


© Jimmy Braun – Octobre 2004


Nb : A noter au passage, la disparition du percussionniste batteur Guy Lefèvre, un personnage remarquable de la classe à François Dupin, puisque tous deux sont nés en 1931.



Bonus vidéo

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