Percussions.org

François Kokelaere · Inscrit le: 24 May 2002 Messages: 270 Localisation: France

Momo Wandel Soumah, nous tire sa révérence.

Wandel vient de décéder à Conakry en Guinée à l'âge mûr de 75 ans après une vie d'artiste bien remplie. Peu connu au regard de son immense talent, Wandel était un saxophoniste atypique issu de l'époque marxiste des grands ensembles nationaux de Guinée.

Membre du célèbre orchestre Kélétigui, sa carrière prit une nouvelle dimension en 1988 lors des ateliers de jazz organisés par la Direction Nationale de la Culture. Il forma alors un groupe expérimental composé d'instruments traditionnels et élabora une musique, totalement traditionnelle quant à son mode de fonctionnement mais très libre quant à sa forme. Balafon, kora, bolon (sorte de contrebasse traditionnelle) flûte et percussions furent arrangés de manière très personnelle en s'inspirant de la richesse infinie des musiques Peul, Malinké, Baga, Soussou et des ethnies forestières. Quand le concept fut stabilisé, Wandel enregistra un disque de légende "Matchowé" (Buda - 92653-2) qui reste une référence en la matière.

On lui doit une version d'anthologie du fameux "Afro blue" composé par Mongo Santamaria mais connu pour l'interprétation exceptionnelle qu'en fit John Coltrane dont il était friand. Il s'entoura pour l'occasion du gratin des musiciens guinéens dont Fatouabou Camara aux percussions (alors membre de l'Ensemble National des Percussions de Guinée) qu'il tenait en haute estime, criant haut et fort qu'il était un des rares à connaître vraiment les rythmes de la Basse-Côte.

Il y avait entre eux un respect profond et une complicité remarquable qui faisait plaisir à voir. Souvent, bien souvent, Fatouabou était le seul à pouvoir maîtriser "le vieux" lors de ses incartades légendaires.

Avec sa voix rauque incomparable et sa façon si musicale de faire chanter le saxophone, Wandel était unique. Unique aussi sa personnalité chaleureuse, attachante, toujours enthousiaste bien que complexe.

Il réalisa par la suite plusieurs albums pour le label belge Fonti Musicali, une rencontre avec le batteur français Bertrand Renaudin "Won béré" et réalisa la musique du film de Laurent Chevalier "l'enfant noir". Il tournait récemment avec le projet "Circus Baobab" dont il fut un des parrains incontestés.

La Guinée est aujourd'hui orpheline de l'un de ses plus brillants artistes, d'un de ses créateurs les plus originaux, qui avait su réussir la mutation de sa musique vers un concept ouvert et universel sans pour autant l'altérer et sans tomber dans une nostalgie souvent facile.

Salut Wandel, salut l'artiste qui nous a fait tant rêver avec une musique d'une innovation, d'une cohérence, d'une modernité, que beaucoup t'envient encore aujourd'hui.

François Kokelaere

C.DricK · Posté le: 16 Jun 2003 14:18 Sujet du message:

Il était, encore, en mars dernier aux cotés de Mamady Keita, Zoumana Dembele, Baba Sissoko... lors de la création Anye Ben Kafo, où son immense joie de vivre et sa musique ont enchanté le théatre de la Monnaie de Bruxelles. Il était parti dans une impro de blues avec sa grosse voix et un énorme sourrire...
Salut l'artiste !

Jpouil · Inscrit le: 27 May 2002 Messages: 304 Localisation: Poissy

Repose en paix Momo !

Balato · Inscrit le: 14 Jun 2003 Messages: 52

Voila une bien triste nouvelle, le temps passe et les hommes avec, Wandel représente une époque, celle où l'influence de la musique occidentale avait marquée une génération, celle du retour aux sources avec la révolution, celle de la créativité avec les orchestres nationaux.

J'ai de la peine, mais c'est la vie, personne n'est éternelle, la dernière fois que je l'avais vu c'était au Parc de la Villette (Paris), avec les jeunes de Circus Baobab, petit sacrifice du paquet de dunhill, c'était un homme simple chaleureux, qui m'avait fait la joie de me recevoir et de blaguer un peu avec moi.

Toujours la musique dans la tête, dommage que le temps passe si vite...
son dernier album Afro swing est une réussite, vraiment !

Bien à toi monsieur Wandel, dit bonjour à Vieux Coka qui t'a précédé de quelques mois, dis-lui c'est le petit français avec sa caméra.

C'est sur ces conseils que j'étais venu te voir.

Je vous aime, j'aurais temps voulu vous écouter encore et encore ....
merci à vous deux pour tout...

Merci aussi à François Kokelaere pour cette Hommage remplit de vérité, et pour d'autres choses...

Stéphane

Pour ceux qu'il veulent revoir Momo en image, ainsi que Coka, il y a deux vidéos sur le site www.donaba.net, ce sont des témoignages de qualités moyennes mais authentiques, vous apprécirez mieux les personnages...

François Kokelaere · Inscrit le: 24 May 2002 Messages: 270 Localisation: France

Bonjour Stéphane Caméra, si tu es bien le Stéphane que je suppute (qu'est-ce que c'est pénible ces pseudos où les gens marchent cachés...) et merci pour ton petit commentaire à propos de Wandel, qui comme tu le dis si bien, était de ceux que l'on pouvait écouter parler des heures durant, ce serait pas mal que tu nous racontes ton histoire avec l'Afrique la vraie, pas la soft, celle du coeur car si mes souvenirs sont bons, tu as un parcours étonnant.

Balato · Inscrit le: 14 Jun 2003 Messages: 52

A défaut de Balato ou de caméra presque juste car mariée à une camara, c'est Siramy.

Ce n'est pas avancer cacher que d'utiliser un pseudo car si on ne sait pas fait un nom, on peut s'en créer un plus affectif.

Quant à mon parcours, il est celui d'un amoureux, encore et encore, et je connais certains dont le chemin est bien plus passionné et passionnant, à bon entendeur salut.

L'Afrique se fut ma rencontre avec la guinée ou lors de mon premier voyage nous nous étions vus à l'alliance(centre ville Conakry) en 95, émerveillé par le talent et le potentiel de ce pays, je décidai de mieux le connaître.

Plus que la musique que j'étais venu étudier, ce fut la découverte d'un autre monde qui correspondait à l'un de mes songes, la vie collective dans la concession, le devoir d'éducation de tous sur les enfants, cette sensation de respect envers tout un chacun, et enfin ce sentiment de justice ou d'injustice que nous percevons enfants.

Ce que j'aime aussi c'est sa façon de vous dire qu'il ne vous aime pas, il ne craint rien de vous, de là le célèbre NON de sékou.

J'ai senti une certaine authenticité un peu brute mais réelle et c'est certainement cela qui m'avait attiré dans la musique

Malgré les quelques déconvenues de jeunes sossos (les marseillais) rusés, j'apprécie ce rapport d'homme à homme qui fait que si l'on sait estimer l'autre, il nous le renvoie, malgré tous les travers c'est droit.

Tout cela peu paraître bien utopique, idéaliste, lorsque l'on connaît la situation du pays et les souffrances qui en découlent.

C'est le revers de la médaille où la pauvreté et le manque d'avenir de la jeunesse déforme le coeur, où l'ensemble devient-le chacun pour soi.

La Guinée c'est un pays de rêve, mal aimé, mal traité, mais qui ne demande que d'être bien dirigé, il y a tout là bas.

Pour revenir à ma découverte du pays après ce voyage de 2 mois à manquepas quartier de Conakry, Je décidai coûte que coûte d'y retourné.

Après avoir obtenu deux bourses, et pas mal bossé je partais faire un reportage en 97, et bien sûr étudier mais rythme préféré que sont ceux du Amana région de Kouroussa.

Mon séjour en guinée dura six mois, dont 3 à Kouroussa et 3 à Conakry là, bien intégrer dans ma famille d'accueil, je pus rencontrer quelques doyens des arts, de la culture et m'arrêtai sur quelques talents.

Difficile de résumé ce séjour que je terminai par un passage à Bamako et un retour sur Dakar, il fut riche en aventure en aller retour sur les routes de guinée, les rencontres d'homme comme Coka ou Wandel mon grandement enseigné, ce temps est gravé en moi, et mon amour pour le pays n'a fait que grandir (petite préférence pour le Amana).

Sinon comparativement Bamako c'est bien tranquille loin de l'agitation et de la pression de la capitale guinéenne avec ces gendarmes, policiers, militaires, fonctionnaires, j'en ais quelques bien bonnes à vous raconter, mais cela serai un peu long.( Histoire d'éveiller votre curiosité, ils m'ont même mis dans leur prison, c'était court rassurez-vous).

Derrière tout cela il y avait l'amour, j'ai rencontré ma femme à Conakry, elle m'a fait l'effet d'une bombe, je l'avais remarqué dés 95, mais ce n'est qu'en 97 que j'ai attaqué l'affaire.

A mon retour je ne lui avais fait aucune promesse, mais son absence se fît sentir, étant sans situation, un peu fragile, comme cela arrive à beaucoup qui reviennent de long séjour en Afrique, ce n'est qu'en 2000 après avoir pu monter mon reportage sur la guinée, que je fus prés, pour la chercher et célébrer notre mariage.

J'avoue que tout cela ne fut pas simple, le tout est d'y être arrivé.
Aujourd'hui nous avons un super petit garçon de 2 ans et demi et partageons le projet de retourné là bas nous installer, peut être pas en Guinée, car on ne sait pas comment cela va évoluer, mais pas très loin.

J'essaye de vous parler de mon expérience la guinée, mais il est bien difficile de vous résumé ainsi en quelque ligne ce que ce que j'y trouvai, Ce que je peux vous dire encore c'est que je désire y retourner le plus rapidement : sentir l'air, la chaleur, les odeurs, la lumière, la vie, les amis...

Bien à vous
Stéphane

François Kokelaere · Inscrit le: 24 May 2002 Messages: 270 Localisation: France

Touchant en tous cas ton témoignage monsieur Siramy. On sent derrière chacun de tes mots qu'il y a un énorme vécu, de l'intérieur mais en effet, comment raconter son histoire quand tant d'images et de sensations se bousculent dans la tête. Tu te rends compte de l'extrême paradoxe de ta conclusion. Tellement envie d'y retourner mais obligé de s'installer pas loin, dans un pays limitrophe car encore trop incertain, trop dangereux, surtout s'il y a un enfant en bas âge. Cela illustre bien l'immense gâchis que subit le peuple guinéen depuis des lustres.

Balato · Inscrit le: 14 Jun 2003 Messages: 52

Hier j'ai rencontré un ami Ibrahima kaba, une vieille connaissance originaire et de retour de Kankan.
Nous évoquions notre désir de construire, de réalisation qui nous anime envers ce pays.
Mais nous sommes dans un attentisme certains, guettant un événement qui permettrait au pays de sortir de sa léthargie.

Cher François Kokeleare, je sais que vous n'êtes guère optimiste sur le sujet, mais peut-on espérer une issus pacifique, responsable, salvatrice pour la Guinée.
Je ne vous demande pas de jouer au devin mais plutôt de relever les indices positifs ?

Bien à vous stephane

Jpouil · Inscrit le: 27 May 2002 Messages: 304 Localisation: Poissy

Pardon d'intervenir, mais je n'ai pas bien saisi cette phrase.

Balato · Inscrit le: 14 Jun 2003 Messages: 52

Salut fripouil

On dirait que tu ne connais pas ce cher pays, et que d'y amener un car de touriste blanc passe aussi inaperçu, que d'aller chercher du riz au marché.
je m'excuse mais toi, qu'y es allé dernièrement, ignores tu les contrariétés que rencontre tous voyageur de guinée.

Pour revenir au fait d'hésiter à s'installer là bas, c'était pour ne pas perdre, et même mieux faire avancer ce que nous pourrons investir, et à l'heure dans ce beau pays il faut-être très solide...

Bien à toi jpouil